La Petite Renarde rusée
de Leos Janaceck
Cette année, du 1er janvier au 1 février, l’opéra Bastille présente La Petite Renarde rusée de Leoš Janáček Après l’Affaire Makropoulos en octobre de l’année dernière, l’Opera de Paris continue donc de produire les œuvres lyriques du compositeur tchèque, et c’est heureux étant donné le faible nombre de leurs représentations dans le monde. Si le public était assez clairsemé pour l’Affaire Makropoulos, la salle était pleine pour La Petite Renarde Rusée ce 19 janvier dernier. Pleine d’enfants d’abord. Il s’agissait d’une « séance relax » durant laquelle pré-adolescents et personnes handicapée pouvaient applaudir, réagir et même partir à leur guise. Il faut saluer cette initiative de l’Opéra Bastille, permettant d’initier ainsi ces publics éloignés souvent de l’art lyrique. Les personnes mal voyantes pouvaient même emprunter des écouteurs à l’entrée afin de suivre le déroulement du drame.
Sous ses abords naïfs qui permettent au jeune public de comprendre immédiatement le récit, cet opéra, comme souvent les œuvres coutumièrement offertes aux enfants, montre bien plus de facettes et de réflexions qu’il n’y parait. Musicalement, il rappelle Mozart, notamment la Flûte enchantée, par ses étapes d’un parcours initiatique, sa musique fluide et chamarrée, et la diversité de ses personnages. Narrativement, il présente deux mondes parallèles, qui n’entrent en contact l’un avec l’autre que par la violence.
LA PETITE RENARDE RUSEE
La scène imaginée par le décorateur américain Nicky Rieti avec le metteur en scène français André Engel, que reprend la metteuse en scène allemande Dagmar Pischel, est coupée en deux en longueur par un chemin de fer, séparant le monde des humains de celui des animaux. Le monde sauvage est ici un champ de tournesols. Des enfants y apparaissent de toutes parts, en insectes, batraciens et cervidés. Les costumes de Elizabeth Neumuller sont particulièrement réussis, surtout ceux des animaux de taille moyenne comme les biches, le chien ou le blaireau anthropomorphisés. La lumière de l’éclairagiste français André Diot est brutale, voir sèche, concentrant l’attention sur l’action, et les dialogues. Un peu plus de fantaisie, de rondeur sur le plateau auraient pu animer davantage l’ensemble, parfois trop nu.
Dramatiquement, l’opéra est divisé en brèves scènes entrecoupées par un rideau de scène sur lequel la trame narrative est peinte comme pour un livre d’enfants. Chaque scène est ainsi un petit drame enchaîné au suivant par la présence de la renarde, ou du garde-chasse jusqu’à ce qu’elle soit assassinée par le braconnier et qu’il accepte de laisser vivre les bêtes. Ce système, permettant certes de changer de décors pendant que l’orchestre continue de jouer, hache cependant l’histoire et finit par gêner le spectateur, sans doute un peu frustré par l’austérité de la mise en scène.